Capter l’attention dans un espace à 360°

Si selon Benjamin Hoguet « ne pas tout voir fait partie du jeu de l’interactivité », il en reste bien souvent des points névralgiques dont l’utilisateur ne peut se passer s’il souhaite comprendre l’expérience à laquelle il souhaite participer. C’est d’autant plus vrai lorsque nous sommes dans un dispositif pédagogique : l’utilisateur doit acquérir certaines compétences, gagner un savoir, apprendre quelque chose et l’on ne peut le laisser totalement libre.
Afin de dégager quelques hypothèses, il est  intéressant de se pencher sur deux expériences distinctes : celle de notre propre vie – qu’est-ce qui attire notre attention lorsque l’on est ailleurs ? – et celle du jeu vidéo, domaine le plus proche de la réalité virtuelle à l’heure actuelle.

 

Je vous propose ci-joint quelques pistes dégagées durant mon stage à Speedernet, entreprise de e-learning s’intéressant au sujet.

Méthode et solutions déconseillées

 

I- Rotation de la scène principale

 

Rotation de scène

Principe :  Cette méthode barbare consiste à repositionner automatique la scène ou l’élément face à l’utilisateur lorsqu’il s’éloigne trop de l’objectif principal.

Cette méthode est particulièrement déconseillée car il s’agit ni plus ni moins que de faire du «forcing» et elle n’est ni interactive, ni intuitive. Si pour une raison quelconque cette solution est malgré tout retenue, il convient de faire un fondu au noir au préalable pour ne pas rendre malade l’utilisateur.

 

II – Ciblage et/ou Zoom

 

Ciblage/Zoom

Principe : Avec un cercle plus coloré par exemple, ou un système de zoom, il est possible d’attirer l’attention sur un objet bien précis. C’est l’équivalent d’un gros plan pour le cinéma. Cette méthode permet d’attirer l’attention non pas sur un lieu, mais plutôt sur un détail, sur quelque chose de bien précis. Il est nécessaire que l’utilisateur ait déjà le regard dans la bonne direction pour le voir.

Cette méthode est déconseillée car l’interaction produite n’est pas naturelle pour l’utilisateur :  zoomer peut favoriser l’apparition du simulator sickness (malaise).

 

III – Ralentir la scène/Mettre en pause

5-ralentissement

Principe : Se la jouer « à la matrix » en ralentissant les scènes les plus éloignées de la scène principale. Méthode peu conseillée.

Cette technique permet de diriger le regard de manière subtile, puisque l’utilisateur comprendra que plus la scène accélère, plus il s’approche de l’endroit qu’il doit regarder. Cependant, les ralentissements sont déconseillés par Oculus VR en raison du risque accru de Simulator Sickness.

Vue à 360°

 

IV – Absence d’événements

Absence d'événement

Principe :  Revient à laisser l’utilisateur face à l’environnement. On ne le guide pas, mais il n’y a qu’une chose à faire, une seule chose à débloquer et il est impossible d’interagir avec le reste de l’environnement.

Cette solution est la plus simpliste mais appauvrie considérablement l’intérêt de la réalité virtuelle. Il convient néanmoins de nuancer le fait qu’accompagnée de la méthode du fléchage (voir ci-dessous), cette méthode pourrait convenir à certaines formes d’interactions.

 

Méthodes et solutions neutres

 

V – Le fléchage

Flêchage

Principe : Beaucoup utilisé pour les jeux de course, la méthode du fléchage est plus intuitive pour un utilisateur moyen. Néanmoins, elle peut être plus compliquée à réaliser techniquement en raison de la problématique de la distance d’affichage : dans un espace en 3D au sein duquel l’utilisateur peut avancer, des objets rencontrés par l’utilisateur peuvent passer au devant de la flèche. Il existe des méthodes pour laisser les flèches en permanence au premier plan, cependant il est essentiel qu’il n’y ait dans l’environnement aucun élément ayant cette même propriété, sans quoi il y aurait confusion. Une solution alternative serait d’inclure les flèches au sein du décor, comme le balisage d’une course, auquel cas il faut que le contexte puisse le permettre.

 

VI – Utilisation de PNJ

Utilisation de PNJ

Principe :  Par des jeux de regards ou des gestes orientés dans une certaine direction, il est possible d’indiquer à l’utilisateur un endroit à regarder.

Cette méthode nécessite la mise en place de personnages non joueurs capables d’interagir avec la présence d’un utilisateur. Elle n’est pas vraiment répétable à l’infini car rapidement redondant.

 

 

Méthodes et solutions conseillées

 

VII – Spatialisation du son

4-son

Principe : Utilisation pour chaque scène d’un son fort, prégnant, moteur, qui est clairement spatialisé. Cette méthode requiert l’intervention d’un sound designer.

Souvent sous-estimé, disons-le clairement : le son est le moyen le plus simple et efficace d’attirer le regard. Lorsque l’on se trouve dans un endroit et qu’un bruit fort se fait entendre, nous avons immédiatement le réflexe de jeter un coup d’oeil. C’est instinctif et cel est tout à fait applicable à la réalité virtuelle.

Afin de pouvoir utiliser cette technique, il faut un son dominant, que j’aime appeler arbitrairement le son « d’attaque » [en musique, l’attaque note le début d’une partition, elle permet de reconnaître instantanément un instrument]. La plupart du temps, ce son doit être une boucle pour laisser le temps aux gens d’explorer les alentours.

Note : Cette manière de faire nécessite l’utilisation d’un casque.
Voyons maintenant les différentes utilisations d’une interface graphique permettant à l’utilisateur de savoir où est le prochain point d’intérêt, le lieu où il doit se rendre.

 

VIII – Utiliser la luminosité

Luminosité

Principe : Grâce à une bonne utilisation de la lumière, il est possible d’inciter un utilisateur à s’intéresser à un point précis sans contrarier le principe d’immersion.

Cette méthode permet de mettre en avant un élément, mais également d’indiquer une direction lorsqu’on la couple avec un système de palliers.

 

IX – La map

8-lamap

Principe : Usage d’une carte sur laquelle les points les plus importants sont mis en avant ; libre à l’utilisateur de le suivre ou non.

Un jeu de couleur ou de formes peut indiquer à l’utilisateur les évènements les plus importants, ceux requis pour débloquer la suite et les différencier des interactions facultatives/additionnelles (ici, le point rouge semble intuitivement plus important que les points verts).  Dans le cadre d’un espace 2D, il peut s’agir d’une véritable cartographie, avec délimitation du contour. Dans un espace 3D qui se génèrerait au fur et à mesure, il est possible d’utiliser la méthode du radar, où seuls les points d’intérêts sont visibles, pour éviter la lourde tache de créer une carte générative.

 

X – Balises et points d’intérêts

6-balisage

Principe : La méthode du balisage fonctionne avec un système de plots qui permettent d’établir ensemble un itinéraire. Fixant un point grâce au système de visé, on peut amener l’utilisateur là où l’on veut en faisant apparaitre un nouveau point dès lors que le premier est atteint. La progression entre chaque point peut être forcée ou non : soit la caméra avance automatiquement (extrêmement déconseillé car produit un Simulator Sickness très important) , soit l’utilisateur suit lui-même chacun des points, à l’image de la trainée argentée de certains jeux (ex : Fable III), soit un point déclenche une nouvelle scène (passage au noir puis scène suivante). Ce système peut paraitre répétitif.

Et vous ?

Ces points sont le fruits de quelques observations, néanmoins je suis toujours ouvert à la découverte de nouvelles méthodes et suis prêt à remettre en question certains points, aussi n’hésitez pas à me partager votre avis ou vos expériences !

Ressources d’illustration par Freepik.

Simon Foucher
Scénariste-concepteur de dispositifs interactifs depuis plus de 5 ans, je suis un passionné d'écriture rédigeant sur son temps libre scénarii, nouvelles, romans, jeux de rôles. Diplômé d'un master de scénarisation multisupport, de cinéma et de graphisme multimédia, je suis un véritable touche à tout qui adore comprendre et maîtriser les différents supports qu'il pratique. A ce titre, une partie de ma profession m'a amené à m'interroger sur la réalité virtuelle et la narration immersive. Aujourd'hui âgé de 28 ans et situé à Lyon, je scénarise serious games, webdocumentaires, films 360, applications VR/AR et développe sous Unity3D (C#). Mail de contact : z.simon.foucher@gmail.com
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